Pour ceux qui aiment Kurt Weill, et pas que pour le Drei Groschenoper (l’Opéra de quatre sous), l’opéra de Lorraine donne Silbersee (Le Lac d’argent) en avril. Kurt Weill, comme Gershwin, à l’opposé de Ricard Strauss, veut revenir à une forme populaire de l’art lyrique, raison pour laquelle le jazz et le music-hall marquent autant l’opéra que la musique savante. Ces deux sources apparemment contradictoires - populaire et savante- structurent l’œuvre, ce que veut faire la mise en scène également. Ce n’est donc pas simplement Silbersee, mais une troupe voulant jouer Silbersee, qui est sur scène. Aucune idée du metteur en scène, incarnation de Ersan Mondtag, joué par Benny Claessens, qui jouera aussi Olim - - ne tient la route. Sa première idée est de transposer l’œuvre en 2033 avec des mutants aux pattes animales surnuméraires - comment l’humanité en arrive à ce stade là en neuf ans, mystère. Constatant l’erreur, la suivante est de placer le deuxième acte en un pseudo temple égyptien, avec des costumes de pharaons et de Cléopâtre. Un décor bourgeois viendra ensuite. L’opéra finira en un fond bleu. Ce changement de décor et de costumes constant, dans lesquels les protagonistes des actes précédents, y compris les mutants, reviennent, s’il fait cabaret à un œil miséricordieux, finit par ennuyer.
L’homosexualité latente chez Kurt Weill est outrée ici, comme le reste. L’outrance finit en vulgarité avec la posture de Séverin, qui offre régulièrement son postérieur ou la fellation d’Olim à Severin par exemple, le comportement de grande folle hystérique d’Olim, les costumes en latex du dernier acte - Séverin en aura un avec pantalon coupé sous les hanches, string, corset et un chapeau de marin rose fuchsia,-, et le décor, avec le temple-château avec un Saint Sébastien (Debussy ?), Ping et Liu (Puccini ?) et Jésus (religion ?) en cariatides–pourquoi ces allusions, mystère.
La quatrième erreur est d’avoir changé le libretto pour le mettre en français et de le faire correspondre de toutes forces au temps présent. Si les récitatifs sont en allemand, en français et même en anglais, les airs et chansons restent en allemand. Chaque langue ayant sa musicalité propre, le rythme de l’opéra est ainsi brisé régulièrement. D’autant que les ruptures ne suivent aucune logique. Au lieu de se contenter des thèmes de l’opéra, - la faim, le brouillage de pauvres bougres par un vieux système aveugle et inhumain, Ersan Mondtag à vouloir pousser l’actualisation de l’opéra jusque dans ses retranchements, ajoute encore le conflit israélo-palestinien et l’homophobie. Ça fait beaucoup. D’autant qu’aucun sujet n’est véritablement traité. L’ensemble donne un amalgame confus, touffus, volontiers vulgaire, au lieu d’être populaire, et survolant sans maitriser les sujets qu’il montre.
Au milieu de ce fatras, si Joël Terrin en Séverin et James Kryshak en baron Laur chantent comme au cabaret, Nicola Beller Carbone en Mrs von Luber et Ava Dodd en Fennimore le font comme à l’opéra Bastille. Et si la chanson de César, chanson anti hitlérienne pour les auditeurs, aurait mérité moins de science pour être juste, la façon de chanter de Nicola Beller Carbone montre bien son statut social. Le duo de James Kryshak et de Nicola Beller Carbone résume bien la bigarrure de l’opéra. La meilleure partie du spectacle est sans doute Gaetano Lo Coco le chef d’orchestre qui réussit l’arlequin musical de l’opéra. Le spectateur reste quelque fois, juste pour lui.
Andreas Rey
Deutsch
Für diejenigen, die Kurt Weill nicht nur wegen der "Dreigroschenoper" lieben, führt die Oper von Lothringen im April 2024 "Silbersee" auf. Kurt Weill will wie Gershwin, im Gegensatz zu Richard Strauss, zu einer volkstümlichen Form der Opernkunst zurückkehren, weshalb Jazz und Music Hall die Oper ebenso prägen wie die klassische Musik. Diese beiden scheinbar widersprüchlichen Quellen - populär und ernst- strukturieren das Werk, was auch die Inszenierung erreichen will. Es ist also nicht einfach "Silbersee", sondern eine Truppe, die Silbersee spielen will, die auf der Bühne steht. Keine Idee des Regisseurs, der Ersan Mondtag verkörpert, der von Benny Claessens gespielt wird, der auch Olim spielen wird -, ist stichhaltig. Seine erste Idee ist es, das Werk ins Jahr 2033 mit Mutanten mit überzähligen Tierbeinen zu verlegen - wie die Menschheit in neun Jahren so weit kommen konnte, ist ein Rätsel. Als sie den Fehler bemerken, ist die nächste, den zweiten Akt in einen pseudo-ägyptischen Tempel zu verlegen, mit Kostümen von Pharaonen und Kleopatra. Danach folgt ein bürgerliches Bühnenbild. Die Oper endet mit einem blauen Hintergrund. Dieser ständige Wechsel des Bühnenbilds und der Kostüme, in denen die Protagonisten der vorherigen Akte, einschließlich der Mutanten, wieder auftauchen, wirkt zwar kabarettistisch für ein barmherziges Auge, langweilt aber letztendlich.
Die latente Homosexualität bei Kurt Weill wird hier, wie alles andere auch, outriert. Die Übertreibung endet in Vulgarität mit der Körperhaltung von Severin, der regelmäßig sein Hinterteil oder Olims Oralsex an Severin anbietet, zum Beispiel, Olims hysterischem Verhalten als große Verrückte, den Latexkostümen im letzten Akt - Severin bekommt eines mit unter den Hüften geschnittenen Hosen, Tanga, Korsett und einem fuchsia-pinken Matrosenhut,- und dem Bühnenbild, mit dem Tempel-Schloss mit einem Heiligen Sebastian (Debussy? ), Ping und Liu (Puccini?) und Jesus (Religion?) als Karyatiden-warum diese Anspielungen, Rätsel.
Der vierte Fehler ist, dass man das Libretto ins Französische geändert hat und es mit aller Gewalt an die heutige Zeit anpasst. Während die Rezitative auf Deutsch, Französisch und sogar auf Englisch sind, bleiben die Arien und Lieder auf Deutsch. Da jede Sprache ihre eigene Musikalität hat, wird der Rhythmus der Oper auf diese Weise regelmäßig gebrochen. Dies gilt umso mehr, als die Brüche keiner Logik folgen. Anstatt sich mit den Themen der Oper zu begnügen - Hunger, die Verstümmelung armer Leute durch ein altes, blindes und unmenschliches System -, versucht Ersan Mondtag, die Aktualisierung der Oper bis an ihre Grenzen zu treiben, und fügt noch den israelisch-palästinensischen Konflikt und die Homophobie hinzu. Das ist eine Menge. Zumal kein Thema wirklich behandelt wird. Das Ganze ergibt ein verwirrendes, wuseliges Amalgam, das gerne vulgär statt volkstümlich ist und die Themen, die es zeigt, ohne Meisterschaft überfliegt.
Inmitten dieses Durcheinanders singen Joël Terrin als Séverin und James Kryshak als Baron Laur zwar wie im Kabarett, Nicola Beller Carbone als Frau von Luber und Ava Dodd als Fennimore jedoch wie in der Bastille-Oper. Und während Cäsars Lied, das für die Zuhörer ein Anti-Hitler-Lied ist, weniger Wissenschaft verdient hätte, um richtig zu sein, zeigt Nicola Beller Carbones Art zu singen ihren sozialen Status. Das Duett von James Kryshak und Nicola Beller Carbone fasst die Buntheit der Oper gut zusammen. Der beste Teil der Aufführung ist zweifellos Gaetano Lo Coco, der Dirigent, dem der musikalische Harlekin der Oper gelingt. Der Zuschauer bleibt manchmal, nur für ihn.
Andreas Rey
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